Banque : la vente de HSBC France gelée soudainement
Le monde le 13 avril 2023
La remontée des taux d’intérêt oblige le repreneur de la filiale française du groupe britannique à modifier le projet de cession, explique HSBC. L’annonce inquiète les salariés.
Par Marc Angrand – Publié le 13 avril 2023 à 19h33
Mauvaise surprise pour les salariés et les clients du réseau bancaire HSBC France. Vingt-deux mois après l’annonce de la vente de ses activités à My Money Group (MMG), filiale du groupe de capital-investissement américain Cerberus, HSBC a annoncé, vendredi 14 avril, avoir été informé par « l’acquéreur » que « les hausses significatives et inattendues des taux d’intérêt » rendaient « moins certaine » la conclusion de l’opération.
En clair, MMG estime que la remontée du coût du crédit augmente « significativement » le montant des capitaux propres requis pour mener à bien l’opération, qui devait être bouclée avant la fin de l’année. « A moins que ce problème ne soit résolu », ajoute HSBC dans un communiqué, les autorités bancaires françaises pourraient refuser de donner leur feu vert à l’opération.
Les discussions entre les deux parties continuent et HSBC assure rester « engagée » à mener à bien le projet. Du côté d’HSBC France, on précise qu’« il est trop tôt pour spéculer sur un quelconque plan alternatif ». Pas question, donc, d’évoquer la recherche éventuelle d’un autre acquéreur ou un maintien de la filiale tricolore au sein du groupe.
Mais en attendant, les activités françaises ne sont plus comptabilisées comme « détenues en vue de la vente », une classification comptable qui suppose une « forte probabilité »de cession à un horizon de douze mois. Et le groupe va reprendre la provision de deux milliards d’euros prévue pour couvrir le coût de l’opération.
HSBC France comptait au moment de l’annonce de la vente 800 000 clients, 244 agences et 3 900 salariés. Ces derniers ne sont plus aujourd’hui qu’environ 3 600 selon les syndicats.
« Tout est fait » pour que le projet aboutisse
La remise en cause du calendrier du projet, annoncée au Comité social et économique (CSE) en début d’après-midi vendredi, puis à l’ensemble des salariés dans un message vidéo, a évidemment surpris, d’autant que le changement d’actionnaire avait commencé à se concrétiser. « Le projet était bien enclenché : les équipes de MMG étaient venues se présenter, des premiers tests de bascule informatique s’étaient globalement bien passés, explique Eric Poyet, délégué Force ouvrière chez HSBC France. Mais aujourd’hui, on peut légitimement se poser des questions : pour qu’il y ait une vente, il faut que les deux parties soient d’accord. »
Pour Didier Gens, délégué CFDT, « la direction ne veut pas dire que le projet a capoté mais il est compromis aux conditions prévues en 2021 : la solution pour HSBC, c’est de remettre de l’argent au pot. Si Cerberus était une banque, avec des dépôts, il pourrait financer le rachat. Apparemment, la hausse des taux chamboule tout ».
De son côté, My Money Group ne fait aucun commentaire officiel sur le communiqué de HSBC mais, de source proche de la filiale de Cerberus, on assure que « tout est fait » pour que le projet aboutisse.
L’objectif affiché par MMG lors de la signature de l’accord-cadre sur la vente en novembre 2021 était de relancer les activités reprises à HSBC sous la marque CCF, l’ex-Crédit commercial de France, une enseigne que le groupe britannique avait fait disparaître quelques années après son rachat en 2000 pour près de 11 milliards d’euros. « Tout le monde espérait retrouver de l’élan et du souffle commercial avec le retour du CCF. Aujourd’hui, on ne sait plus », résume M. Poyet.
Marc Angrand